10 septembre 1983.
JUMELAGE VELLERAT-FOURONS.
Intervention de Jean-Louis XHONNEUX, secrétaire général
de l'Action fouronnaise.
Hier
matin, la très sérieuse "Libre Belgique" se demandait si on allait
internationaliser le problème fouronnais. Sa correspondante à Genève lui
avait en effet envoyé un papier concernant le communiqué du Rassemblement
jurassien annonçant ce jumelage.
Au-delà
de la similitude de nos combats et des liens qui unissent déjà les jurassiens
et les fouronnais, nous avons certainement voulu ce jumelage pour nous épauler
dans nos combats respectifs et un des moyens à employer est
l'internationalisation; la libération d'une partie du Jura l'a démontré.
Nous
avions déjà évoqué l'éventualité d'un jumelage entre Fourons et une
commune jurassienne en août 1977 avec Monsieur Roland BEGUELIN. Rarement un
jumelage aura autant mûri que le nôtre. M. BEGUELIN relança l'idée à la Fête
de la Jeunesse en 1982 et il faut croire que ce n'était pas très clair pour
tout le monde puisqu'un journal suisse titrait le lendemain que Vellerat préparait
un jumelage avec la Flandre.
Notre
but commun est donc de faire connaître nos revendications politiques le plus
largement possible et nous croyons que notre commune jumelle et l'important
mouvement qui la soutient pourront nous y aider.
Nous
nous engageons à faire connaître le sort injuste réservé à Vellerat et à
tout le Jura Sud, partout où nous en aurons la possibilité.
L'histoire
de notre annexion à la province du Limbourg que nous voulons quitter ne remonte
pas au Congrès de Vienne, mais seulement à 1963. C'est en effet le ler
septembre 1963 qu'est entrée en application la loi fixant définitivement le
tracé de la frontière linguistique en Belgique.
La
Constitution belge ne reconnaît pas le référendum. C'est donc le Parlement
central qui légifère et lui seul. Il faut savoir que les deux Chambres sont
composées majoritairement
d'élus
flamands. Alors que les majorités s'étaient toujours formées jusque là sur
des raisonnements politiques ou philosophiques, le vote de la loi sur la frontière
linguistique fit apparaître pour la première dans l'histoire parlementaire
belge une scission entre francophones et néerlandophones.
Depuis
ce 1er septembre 1963, tous les scrutins électoraux se sont
transformés à Fourons en référendums, puisque systématiquement les électeurs
ont eu à choisir entré le vote pour des candidats flamands ou une autre
solution. Nous avons chaque fois obtenu la majorité en faveur des thèses préconisées
par les francophones : élection de candidats "Retour à Liège" aux
élections communales, majorité de bulletins nuls aux élections législatives,
etc. Il faut dire ici que le vote est obligatoire en Belgique.
Lors
des élections européennes de 1979, nous avons même obtenu qu'un nombre
important de fouronnais n'aillent pas voter, alors que cela pouvait être
punissable.
La
volonté de la population d'appartenir à la Province de Liège a donc été
maintes fois répétée.
Les
élections communales de 1982 nous ont permis de faire un nouveau pas dans notre
résistance. La population fouronnaise a véritablement plébiscité José
Happart : il a obtenu un tiers de toutes les voix exprimées et la moitié des
voix francophones.
Chez
nous, le bourgmestre n'est pas élu par la population, mais il est nommé par le
Roi, c'est-à-dire le Gouvernement ou tout simplement le Ministre de l'Intérieur.
Les
conseillers majoritaires ont donc présenté la nomination de José Happart au
Roi. La presse flamande a mené une telle campagne que le Gouvernement a dû délibérer
pendant 24 heures, une première fois, pour présenter une "solution"
au contentieux fouronnais : il s'agissait de nous rattacher à un arrondissement
administratif situé au-delà de Bruxelles, soit à plus de 100 km.
Cette
proposition gouvernementale (approuvée par tous les ministres pendant le
dernier week-end de janvier) fut rapidement combattue par la presse flamande. En
quelques jours, les ministres flamands renièrent leur parole et il fallut un
nouveau conclave gouvernemental qui dura 72 heures pour décider que José
HAPPART deviendrait bourgmestre, mais seulement le 1er janvier 1983;
jusque là il est premier échevin faisant les fonctions de bourgmestre.
Quand
les français rient des histoires belges, ils n'ont peutêtre pas toujours
tort.
Nous
nous battons donc dans un contexte un peu différent du vôtre parce que nos règles
administratives ne sont pas les mêmes.
Mais
nos combats sont tellement semblables aussi.
Berne
ennuie Vellerat pour une histoire de conduites d'eau. Hasselt nous accuse de ne
pas entretenir un chemin agricole absolument nécessaire pour attendre une
auberge de jeunesse flamande dont nous avons refusé la construction, mais qui y
est quand même.
Vellerat
refuse d'organiser un scrutin.
Fourons
se demande si c'est bien utile de se donner la peine d'organiser des élections
où ne pourront être élus que des hommes et des femmes qui nous sont
manifestement hostiles.
Voilà
en quoi nous avons certainement des expériences à échanger.
Il
y a un mois, le maire de Vellerat rappelait dans son discours du premier
anniversaire que, "derrière Vellerat, c'est tout le peuple jurassien qui
se pose en tant qu'interlocuteur de la justice bernoise. En touchant à la
population de Vellerat, on touche à la population jurassienne".
Là,
nous devons malheureusement reconnaître que nous ne bénéficions pas toujours
du même appui. Beaucoup de wallons nous aiment bien, mais ça ne va pas
toujours beaucoup plus loin. Puis, comme José Happart le rappelait récemment
dans une interview, le peuple wallon n'existe pas encore réellement. Les
Fourons se trouvent donc dans une Belgique en liquidation, face à une Flandre
consciente de sa puissance nationale et même nationaliste, tandis que la
Wallonie n'est encore qu'une nation qui se cherche.
Malgré
tout cela, nous gardons l'espoir et nous comptons sur vous, chers amis de
Vellerat, chers amis jurassiens, pour nous communiquer votre courage et votre détermination.
Nous
disons donc : Vive Fourons, Vive Vellerat,
Vive
la Wallonie de Comines à Fourons,
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© jlx@wallon.net - Dernière modification le 24/12/2005