Monsieur
l'Administrateur général de l'Office national de Sécurité sociale
Boulevard de Waterloo, 76
1000
BRUXELLES
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Nos
références : 27.030/II/F/SM
JP/DV
OBJET :
plainte concernant l'emploi des langues en matière administrative.
Monsieur
l'Administrateur-général,
En date du 30 mars 1995, 1a Commission permanente de
Contrôle linguistique (C.P.C.L.), siégeant sections réunies, a examiné une
plainte du 12 février 1995, reçue le 16 dito, déposée contre l'Office
national de Sécurité sociale par un employeur francophone de Fourons, à
savoir M. …………, Hagelstein, 42.
Le plaignant déclare
qu'il possède une entreprise commerciale dont le siège d'exploitation est à
Fourons et qu'il
a reçu de la part de l'O.N.S.S., des formulaires de
déclaration pour 1e 4ième trimestre 1994 ainsi que les avis et instructions
concernant la sécurité sociale et l'INAMI rédigés exclusive ment en néerlandais.
A
sa requête, le Commissaire d'arrondissement adjoint de Fourons a demandé à
l'O.N.S.S. de l'enregistrer comme employeur francophone et de lui adresser toute
correspondance en français. L'O.N.S.S. aurait répondu qu'en vertu de l'article
52 des lois sur l'emploi des langues en matière administrative cooordonnées
par l'arrèté royal du 18 juillet 1966 (L.L.C.), l'intéressé devait
obligatoirement être enregistré dans le fichier des employeurs néerlandophones
et qu'à titre provisoire, il acceptait de lui faire parvenir en langue française
un spécimen du formulaire de déclaration, ainsi que les avis et instructions,
à condition qu'il en renouvelle à chaque fois la demande auprès du Service
Documents de l’O.N.S.S.
Le
plaignant estime que les "actes et documents imposés par la loi et les règlements"
dont il est question à l'article 52 des L.L.C. ne visent que les actes et
documents émanant des entreprises et que tous les autres
documents adressés à une entreprise située
dans une commune à régime linguistique spécial doivent être considérés
comme des rapports avec un particulier bénéficiant des "facilités"
au même titre que les autres particuliers habitant ces communes.
La C.P.C.L. constate qu'il s'agit d'une plainte visée
par l'article 61, § 7, des L.L.C., inséré par l'article 123 de la loi spéciale
du 16 juillet 1993 visant à achever la structure fédérale de l'Etat (Moniteur
belge du 20 juillet 1993).
Cet article dispose notamment que la C.P.C.L. émet
un avis dans les 45 jours de la réception de la plainte.
Par lettre du 1er mars 1995, rappelée par
FAX le 16 mars 1995, la C.P.C.L. vous a prié de lui faire savoir, dans les dix
jours:
1) Si le plaignant a demandé et a obtenu d'être enregistré comme
employeur francophone auprès de l'O.N.S.S.;
2) si les documents qui lui sont envoyés émanent du service central de
l'O.N.S.S.;
3)
de quels documents il s'agit et en quelle langue ils sont rédigés.
Veuillez faire la distinction entre les documents imposés par les lois et les règlements
que les entreprises industrielles, commerciales et financières doivent rédiger
conformément à l'article 52 des L.L.C., et les documents qui ont le caractère
de relations entre le service public et les particuliers (personnes physiques ou
entreprises privées), tels que, par exemple, la correspondance, visée par
l'article 41, § 1'r des L.L.C.
Par
lettre du 27 mars 1995, vous avez répondu ce qui suit:
«En réponse à votre lettre
susvisée, je vous confirme que l'employeur précité, bien que dans sa
"demande d'inscription" il ait choisi la langue française, est
inscrit à l'O.N.S.S. sous le régime linguistique néerlandophone.
L'O.N.S.S. est tenu, en vertu de l'article 52 de
l'arrêté royal du 18 juillet 1966, de reprendre dans le registre néerlandophone
des employeurs l'employeur dont le siège d'exploitation se situe dans une
commune néerlandophone de la frontière linguistique avec un statut spécial
(Fourons) et dont l'activité économique (entreprise de construction) a un
caractère commercial. Cela implique que comme employeur, par l'intermédiaire
de la Société de Mécanographie, il reçoit de l'O.N.S.S. aussi bien le
formulaire de déclaration, document prescrit par la loi, que les avis et
instructions, en langue néerlandaise.
L’O.N.S.S.
est
dispensé
afin
d'assister l'employeur pour
l'accomplissement de ses obligations administratives à lui
fournir
en français un "spécimen" du formulaire de déclaration et des avis
et instructions, à condition que l'employeur introduise chaque fois une demande
au "Service Documents" de l'O.N.S.S. et que l'employeur remplisse le
formulaire de déclaration envoyé initialement.
Finalement, je veux souligner que chacun qui se présente
comme particulier à mon administration sera servi dans la langue dans laquelle
sa lettre est rédigée, à condition, bien entendu, que la langue choisie soit
une des langues reconnues légalement en Belgique.»
Dans le cas présent, la C.P.C.L. estime qu'il
y a lieu de faire une distinction entre les documents des entreprises visés à
l'article 52 des L.L.C. et la correspondance relevant des rapports entre les
services publics et les particuliers.
A.
L'article 52, § 1er , alinéa 1 des L.L.C. dispose comme
suit: «Pour les actes et documents imposés par la loi et les règlements et
pour ceux qui sont destinés à leur personnel, les entreprises industrielles,
commerciales ou financières font usage de la langue de la région où est ou
sont établis leur siège ou différents sièges d'exploitation».
Si de telles entreprises ont leur siège à Fourons, la langue à employer pour
ces documents est celle de la région, c'est-à-dire le néerlandais.
Dans le cas sous examen, si les déclarations à remplir par le plaignant,
titulaire d'une entreprise commerciale, sont imposés par la législation en
matière d'O.N.S.S. ou par d'autres lois ou règlements, la langue à employer
est le néerlandais (cfr. avis n° 26.017 du 1.12.1994).
Sur ce point, la C.P.C.L.
estime que la plainte est recevable mais non fondée.
B.
L'article
41 des L.L.C. dispose comme suit:
«§ 1er. Les services centraux utilisent dans leurs rapports avec
les particuliers celle des trois langues dont ces particuliers ont fait usage.
§ 2. Ils répondent cependant aux entreprises privées établies dans une
commune sans régime spécial de la région de langue française ou de langue néerlandaise
dans la langue de cette région. »
De ce qui précède, il résulte que le mot "particulier" utilisé par
les L.L.C. vise le secteur privé par opposition aux services publics et
recouvre à la fois tant les personnes physiques que les entreprises privées,
sans la moindre dérogation en ce qui concerne les communes à régime linguistique
spécial.
Il n’y a lieu de faire une distinction entre particuliers et entreprises privées
que pour les entreprises établies dans une commune sans régime spécial auquel
cas le service public répond à cette entreprise dans 1a langue de la région.
Même pour les entreprises industrielles, financières et commerciales, la
correspondance entre le service public et l'entreprise concernée ne tombe pas
sous l'application de l'article 52 des L.L.C., comme cela a été dit clairement
lors des travaux préparatoires des lois linguistiques, notamment dans le
rapport DE STEXHE-Sénat 1962-1963, n` 304, page 13 (cfr. avis 25.138 du
1.12.1994).
L'O.N.S.S. est un service central qui, en application de l'article 41, § 1°r,
des L.L.C., utilise, dans ses rapports avec un
particulier, celle des trois langues dont le particulier a fait usage.
L'appartenance linguistique francophone du plaignant lui est connue.
-
En conséquence, les rapports
entre l'O.N.S.S. et l'employeur susvisé doivent se dérouler dans la langue
choisie par celui-ci, c'est-à-dire en français, langue en laquelle les avis et
instructions doivent lui être transmis sans préjudice du fait que les actes et
documents imposés par la loi et les règlements et ceux qui sont destinés au
personnel doivent être rédigés dans la langue de la région.
De plus, dès qu'un particulier bénéficiant de facilités linguistiques s'est
manifesté comme francophone, il ne doit pas renouveler, auprès d'un même
service, sa demande d'être traité comme tel, étant entendu que le dossier en
service intérieur doit être traité dans la langue de la région où l'affaire
est localisée, en l'occurrence en néerlandais en application de l'article 39,
§ 1er, des
L.L.C.
La C.P.C.L. estime que la plainte est recevable et
fondée en ce qui concerne le point B.
Conformément à l'article 61, § 7, des L.L.C., le
présent avis est communiqué au plaignant, à Madame Magda DE GALAN, Ministre
des Affaires sociales et à Monsieur Johan
VANDE LANOTTE, Vice-Premier Ministre et Ministre de l'Intérieur.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur général,
l'assurance de ma considération distinguée.
Le Président,
A. VAN CAUWELAERT-DE WYELS.
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© jlx@wallon.net - Dernière modification le 24/12/2005