réécrit
l’Histoire des Fourons
Réfutation des allégations du Prof. Jean BAERTEN (VUB)
dans
« Harde
Vlaamse koppen, de Boeren van Voeren (1995)
&
Voeren
1921-1995 , de Belgische democratie op Drift (1997)
par
En 1995 et
1997 le professeur d’histoire à
Il s’agit
de deux ouvrages de 112 et 206 pages qui prétendent constituer des ouvrages
historiques alors qu’il ne s’agit que de pamphlets flamingants pseudo-historiques. Les
pages qui suivent tenteront de souligner les plus flagrantes libertés
avec l’histoire que l’on doit déplorer dans ces deux livres, malgré les
innombrables recherches historiques qu’il y a lieu de reconnaître à leur
auteur.
Dans le
premier ouvrage, il commence fort en accusant les Limbourgeois néerlandais de
faire croire que les Fourons seraient une région d’élevage comparable au Pays
de Herve et qu’un changement de paysage coïnciderait avec la frontière.
Il avoue
aussi laisser aux philologues des discussions sans fin sur le caractère
« néerlandais » ou « allemand » des dialectes thiois parlés
entre Liège et Aix , mais il ne se gène nullement tout au long de ses deux
livres pour assimiler les utilisateurs du dialecte fouronnais à des flamands.
Dans sa
première partie qu’il titre « Fourons ne
fait pas partie du Pays de Herve », il tire des conclusions hâtives du
fait que le tissage à domicile était moins répandu dans les Fourons que vers Thimister-Clermont alors que seule la distance explique
cela.
Il
constate que les structures agraires sont différentes mais doit reconnaître que
tant à Thimister qu’à Fouron-le-Comte 65% des
habitants possèdent 75% de la superficie. Ce n’est certes pas le cas à Fouron-Saint-Martin
tandis mais les situations sont tellement différentes d’un village à l’autre
dans le Pays de Herve mais aussi dans les Fourons que tirer des conclusions
différentes pour les Fourons relève de l’absurde. Il suffit pour s’en
convaincre de regarder les structures agraires de Teuven. Le hameau de Nurop est depuis longtemps divisé en une multitude de
petites parcelles dont les habitants sont propriétaires tandis que le village
de Teuven et les abords de Sinnich sont constitués de
grands domaines.
Dans les
conclusions de ce chapitre agricole J Baerten délire
en affirmant que seule la partie wallonne du duché de Limbourg et du comté de Dalhem participa à l’industrialisation. Or celle-ci était
aussi absente de villages tels que Hombourg, Warsage,
Bombaye etc.. uniquement parce qu’ils étaient trop distants aussi de
Verviers. Il affirme aussi que les
Fourons dans leur ensemble ne passèrent pas à l’économie laitière,
contrairement au Pays de Herve. Or il est évident que celle-ci était aussi
présente dans les Fourons (sauf à Fouron-le-Comte et Mouland)
que dans le reste du Pays de Herve et même plus qu’à Warsage
ou Bombaye, plus orientés vers les cultures…Contrairement
à ce qu’il affirme, la possession foncière n’est pas plus en des mains
extérieures dans les Fourons qu’ailleurs au Pays de Herve. Nurop
et Fouron le Comte en sont de parfaits exemples.
Sa seconde
partie est intitulée « Fourons : un territoire flamand depuis des
siècles ».
Il
commence par dénigrer le peu d’arguments de l’historien liégeois Jean Lejeune,
lequel disposait selon lui de peu d’éléments
pour démonter le caractère francophone des Fourons. Sans vouloir prendre la défense de J Lejeune
qui n’a guère approfondi l’histoire locale de nos contrées, force est de
constater que J Baerten et, sans doute J Lejeune aussi, ne sont pas en
mesure de comprendre les spécificités de ces régions.
On le voit
à la p 41 (renvoi 58) quand il relate le recensement du 15 octobre 1846 à
Hombourg (dont faisait partie Rémersdael) où 89% des habitants se déclaraient
« flamands ». J Baerten s’inspirera très
utilement des conclusions que nous avons développées à ce sujet dans l’opuscule
« Centenaire du Doyenné de Montzen » paru en 1988, où nous démontrons la farce que
constituait tous les 10 ans le recensement linguistique en Belgique où,
contrairement à
J Baerten prétend que durant les années 1970 et 1980 des
politologues de l’ULG auraient publiés dans le CRISP
que la langue première du duché de Limbourg était le wallon et que les contacts
entre l’administration et les villages se seraient déroulés en français.
Il
enchaîne (p 43) en affirmant que les Fourons étaient administrés en flamand. Et
il cite notamment (p 47) le fait que les registres paroissiaux de Teuven ne sont pas rédigés en latin en 1620-1626
mais en « néerlandais » Pour
un historien, affirmer pareil anachronisme dans une région où cette langue qui
n’était pas encore née est révélateur. Il confond allègrement (car sans cela
toute sa théorie s’écroule) tout au long de ses deux livres les mots « vlaams », « nederlands »,
« diets » (flamand, néerlandais, thiois).
En l’occurrence, il aurait dû citer un 4ème mot, à savoir
« Brabançon » car la langue écrite utilisée au 17ème
siècle par certains curés originaires de cette contrée était effectivement le
« Bromesch » qui était aussi la langue
écrite (non parlée) de la plupart des gens instruits chez nous lorsqu’ils
correspondaient avec l’autorité ducale installée en Brabant.
Jamais le
terme « néerlandais » ne peut être utilisé pour qualifier ces écrits
car le Bromesch (qualification dialectale de cette
langue) n’a pas donné naissance au néerlandais. J Baerten
répète pourtant un peu plus loin, à propos d’un écrit de l’Ordre Teutonique à
Fouron-Saint-Pierre, la même erreur flagrante et inadmissible pour
un « historien » .
A la page
48 une carte délimite les territoires « « flamands » et
« wallons » de l’ancien duché
de Limbourg (Dolhain) et de l’ancien comté de Dalhem. On y trouve Bilstain
parmi les villages « flamands » mais aussi Raeren,
Walhorn, Eupen, Lontzen, etc…et évidemment les « 9 communes de la région de Montzen-Welkenraedt ainsi que les Fourons et Aubel … Il se
base notamment sur le fait que les us et coutumes de
Encore une
fois J Baerten utilise le terme « vlaams » à tort et à travers. S’il avait utilisé ici
le terme « diets » (thiois), sa carte
aurait été presque valable sauf si le terme thiois est entendu dans l’acception
« ancien néerlandais » ou « néerlandais moyen » car , dans ce cas la nécessaire distinction avec l’ancien
allemand doit aussi apparaître et c’est là que surgit le problème majeur car J Baerten évacue ce problème.
En réalité , compte tenu de la connotation politique qu’ont pris par la suite les mots « Vlaams », « Flamand », seules les acceptions
« Diets »,», « Thiois »
dans le sens « idiôme germanique » peuvent
être admises linguistiquement.
Mais J Baerten se complait à parler constamment de rédaction en
« néerlandais » à l’époque de Charles-Quint..(p
51 !) alors qu’à ce moment cette langue doit
encore attendre près de 300 ans pour…naître.
L’auteur
attache énormément d’importance à la splitsing
judiciaire qui serait intervenue à l’intérieur du comté de Dalhem
entre les villages « wallons » ressortissant à la cours de justice de
Dalhem et les villages « flamands »
ressortissant à la cour de Fouron-le-Comte, laquelle statuait en
« flamand » (lire en « brabançon ») . Il situe cette
séparation avant le traité de partage entre les Provinces Unies et le pouvoir
espagnol (1661), lequel attribua plusieurs villages wallons (dont Dalhem et Olne) aux Provinces Unies (Pays-Bas) tandis que
Fourons restait espagnol. Les assertions
de J Baeten qu’il dit reposer notamment sur B Dumont
(qui ne tire pas les conclusions que tire J Baerten)
nécessitent une étude approfondie des archives.
Ensuite il
s’intéresse de nouveau au Duché de Limbourg et considère que les recours tirés
des registres du XVIIIe
siècle au Ban de Montzen ou de Walhorn
sont rédigés en « néerlandais »… Il en tire la conclusion que ceux
qui présentent le duché de Limbourg comme une principauté unilingue francophone
prennent une certaine liberté avec la vérité.
Nous ne connaissons pas d’historien régional sérieux qui ait affirmé
pareille idiotie.
Il ne
perçoit pas non plus de trace du français dans les actes notariés dans les
Fourons sauf quand une des parties contractantes provient d’un village wallon.
Mais il continue à soutenir que la langue utilisée est le néerlandais.
A l’époque
autrichienne J Baerten fait grand cas d’une
contre-proposition de l’intendant Ransonnet du duché
de Limbourg suite à la réforme
administrative de 1787 qui ne tenait pas compte des limites dialectales. Ransonnet proposait quant à lui d’en tenir compte mais ne
fut pas suivi. J Baerten en tire des conclusions
anachroniques « il ne fait aucun
doute que Ransonnet traitait le principe de la
territorialité pour sortir des problèmes linguistiques. L’homme avait une
vision claire des choses mais était manifestement né trop tôt. » . Continuellement, tout au long des
différentes périodes historiques J Baerten essaye de
mettre en évidence les applications du principe de la territorialité (appliqué
à la limite entre dialectes germaniques et romans) sous l’ancien régime tant au
comté de Dalhem qu’au duché de Limbourg. Il serait
intéressant de comparer avec ce qui se faisait dans le reste du duché de
Brabant à la limite entre le « païs roman »
et le « Bromesch ».
A la page
60, J Baerten nous apprend que le comté de Looz (actuel Limbourg) aurait été rattaché à Spa ( ?)
sur le plan administratif lors de l’arrivée des Français (1794). Mais les Français
adoptèrent bientôt des répartitions plus rationnelles bases essentiellement sur
les distances (C’est en fait notre thèse exposée depuis toujours pour expliquer
la frontière établie alors au nord des Fourons entre les deux départements de
l’Ourthe et de
A la page
65 on peut lire que Fouron-Saint-Pierre appartenait au comté de Dalhem sous l’ancien régime ( ! !) alors qu’il
s’agissait d’une terre d’Empire appartenant à l’Ordre Teutonique.
A la même
page il se plaint du fait que , malgré son importance démographique, Fouron-le-Comte
ne fut pas préféré à Dalhem comme chef-lieu de canton
alors qu’ailleurs les français tenaient compte de ce critère. Il attribue ce
choix au fait que ce n’étaient que des fermiers et flamands de surcroît. C’est
peu probable et pour s’en convaincre il suffit de constater le nombre de
villages au sud de Dalhem pour se rendre à
l’évidence. Le choix était purement géographique (distances)
Il aborde
ensuite les recensements linguistiques dans les Fourons au XIXème
siècle sans évoquer l’anomalie de ces recensements par rapport au fait
dialectal pourtant incontestable à cette époque. L’illettrisme régnait encore à
la fin du siècle dans une frange importante de la population qui ne savait
s’exprimer que dans le dialecte local. Qu’on ait fait passer celui-ci pour du
flamand ou de l’allemand d’un recensement à l’autre n’est pas pris en compte
par J Baerten .
Il donne
d’intéressants chiffres sur la population étrangère dans les Fourons en 1856 et
en 1900 et écrit même l’histoire à l’avance en 1995 (p 74) « La présence de néerlandais dans les villages
fouronnais est à ce jour mise en évidence par les francophones parce qu’ils
pourraient faire vaciller la majorité en 2000. Ils avancent que nos voisins du
nord seraient venus ici uniquement pour des raisons fiscales. Pourtant, dans
les recensements de 1856 et 1900 nous avons rencontré pas mal de
néerlandais… » Il est vrai qu’il ne fait pas la proportion mais elle
avoisine les 12 %. Les chiffres du début
du XXème siècle seraient aussi
intéressants à comparer.
Dans les
conclusions (p 78 ) J Baerten
fait l’éloge de l’Ancien régime où le principe de la territorialité aurait été
selon lui respecté (villages thiois gérés en thiois, villages wallons gérés en
wallon ou français) mais tout cet équilibre aurait été mis à mal par le régime
Napoléonien qui aurait fait la part belle aux cantons mélangés en plaçant de
surcroît les Fourons dans deux arrondissements. Il oublie de préciser que
l’ancien régime connaissait plus de limites encore , des enclaves et autres
singularités et que l’appartenance linguistique ou dialectale des villages
n’était pas un critère pour le régime français où seule la distance par rapport
au chef-lieu comptait. Pour le surplus on signalera que dans le canton d’Aubel , principal concerné, les villages à dialecte
germanique étaient largement dominants .
Dans ses
conclusions générales J Baerten évoque les deux occupations allemandes (avec
rattachement au Limbourg) qui, selon, lui tentèrent un « rattrapage »
par rapport à la francisation entreprise depuis 1801 dans le département de
l’Ourthe puis la province de Liège. Il considère aussi que ce serait le fait
que ce soit l’occupant qui ait imposé le rattachement qui le fit mal voir et
provoqua les résultats du recensement de 1947. Il oublie évidemment que les
Fouronnais se rappelaient beaucoup plus en 1947 les effets pervers du
recensement précédent que la parenthèse teutonne.
Il refuse
ensuite qu’on puisse traiter les Fouronnais d’asexués
linguistiques, ce qu’ils étaient pourtant en grande majorité avant 1963 mais il
a raison quand il écrit qu’il suffit de leur donner des structures pour qu’ils
s’épanouissent. Et de lorgner vers le sort enviable fait à
Enfin il
s’en prend encore une fois à la faiblesse du dossier
scientifique de J Lejeune et prétend avancer quant à lui des arguments
scientifiques.
Pourtant
il n’a pas voulu comprendre la spécificité de cette population (que J Lejeune
n’a pas comprise non plus). Elle ressemble en définitive à celle du Grand-Duché ou de l’Alsace. De souche germanique
incontestable par son dialecte qui fait partie de ses entrailles, elle est
orientée économiquement, scolairement, géographiquement et historiquement vers
la francité. Pour J Baerten,
il s’agit d’un reniement à ses origines. Pour la population concernée, pas du
tout mais au contraire, elle ressent cette double appartenance comme une
richesse, un plus mais qui va de soi lorsqu’on est situé à la limite de deux
cultures. C’est ce qui peut constituer la force d’une contrée (Bruxelles, Bâle,
Strasbourg, ….)
Dans son
second livre, un véritable pamphlet contre le comte Lionel De Sécillon, il analyse la période 1921- 1995 en prenant cette
fois de gros risque car il classifie quasi toutes les grandes familles
fouronnaises en leur attribuant un sexe
linguistique et, on s’en doute il trouve
plus de « vlaamsgzinde » (flaminguants) qu’il n’y en a eu … surtout pour la période
d’avant 1963…
Il part
évidemment d’un postulat de départ complètement faux qu’on pourrait résumer
sous forme de définitions : Il ne voit en gros à Fourons ( , comme tout
flamingant) que des « vlamingen » encadré
par des « vlaamsgezinde » d’une part et ,
d’autre part, des francophiles (dont bon
nombre sont à ses yeux des « vlamingen ») .
Il ne voit que de très rares francophones. Mais le sens qu’il attribue à ces
mots est franchement ahurissant :
Pour lui,
un « vlaming » est à Fourons un sujet d’origine
belge ou néerlandaise connaissant le dialecte local ou l’ayant entendu dans sa jeunesse , vivant dans les Fourons, qu’il connaisse ou non
l’ABN et même s’il s’illustre par des actes wallingants
Un Vlaamsgezind (flamingant) est pour lui un vlaming fidèle à ses origines et qui milite pour la cause
flamande.
Un
francophile est pour lui un fouronnais généralement d’origine wallonne venu s’implanter dans les Fourons et qui y défend la cause francophone mais ce peut
aussi être un « vlaming » qui a renié ses
origines, lequel n’aura jamais la qualité de francophone.
Un
francophone est pour lui un Fouronnais d’origine wallonne (donc extérieure aux
Fourons).
Sur de
telles bases il est évidemment inévitable qu’un certain nombre de personnages
décrits dans le livre ne partageront nullement
les orientations qui leur sont attribuées et d’aucuns se retourneront
assurément dans leur tombe.
Il
commence par s’en prendre à ceux qui estiment qu’il aurait fallu traiter les
Fourons de façon spécifique sur base du dialecte qu’ils revendiquent comme
n’étant pas flamand. S’il avait fallu faire un exception pour les Fourons, il
craint qu’il n’ait fallu la faire pour toute
C’est là qu’il apparaît que J Baerten n’a rien
compris. Sans aller jusqu’à pousser son
raisonnement à l’extrême,
Les Grand-Ducaux, eux, ont plutôt fait confiance à des langues
existantes depuis des siècles, le français et l’Allemand, puis ils ont entamé
une vigoureuse campagne pour le maintien du parler de leur terroir, le Letzeburgesch.(francique mosellan)
. A ce jour on peut sans risque de se tromper affirmer que la seule langue
régionale européenne qui se sauvera dans 50 ans est le Luxembourgeois. Toutes
les autres auront disparu irrémédiablement (comme langue parlée) tandis que les
langues dites de culture à commencer par les plus réduites en locuteurs (les
langues scandinaves, l’ABN puis, plus tard
l’allemand et le français) verront progressivement leur sphère d’influence
fondre comme neige au soleil. Les dernières conquêtes de ces langues
disparaîtront les premières (c’est comme langue de l’université qu’elles se
sont imposées en dernier lieu au début du Xxème
siècle et c’est comme langue universitaire qu’elles disparaissent déjà au
profit de la future langue universelle, l’anglais. Pour s’en convaincre ,
il suffit de voir le nombre de chaires universitaires scandinaves où seul
l’anglais a cours. C’est la même chose aux Pays-Bas et il apparaît qu’en
Flandre cela se pratique aussi mais qu’il est interdit d’en parler.
Dans de
telles conditions la politique Luxembourgeoise n’est-elle pas plus efficace.
Jamais le Luxembourgeois n’a rêvé de faire de sa langue une langue
universitaire mais à ce jour il la pratique tandis que les différentes langues
typiques qui peuplent
Le constat
est évidemment le même en Wallonie où le wallon, le picard, le gaumais, le Platdutch et le
Luxembourgeois ne se maintiennent que dans les troupes de théâtre à destination
d’un public de plus de 40 ans.
Si
, pour son émancipation, le mouvement flamand
avait prôné un système à la luxembourgeoise (2 première années scolaires en
parler régional puis progressivement , l’apprentissage de la langue de culture
que tant les petits wallons que les petits flamands avaient peine à pratiquer
voici 80 ans, à savoir le français, chaque parler régional aurait été sauvé et
on n’aurait sans doute pas connu de problèmes linguistiques en Belgique.
Les
leaders du mouvement flamand ont cru qu’il fallait uniformiser leurs parlers
respectifs… Ils les ont reniés, oui.
En effet,
pour utiliser un terme que M. Baerten comprend,
puisqu’il est Tongrois, quand un élève Tongrois ne peut
plus « kalle » mais doit « spreken » à l’école sous peine de se faire taper sur
les doigts par son instituteur, (J Baerten en a
probablement été victime lui-même), il s’agit d’une atteinte non seulement à un
patrimoine culturel mais aussi une atteinte aux droits de l’homme dont la
langue usuelle fait partie.
Dès qu’on
veut uniformiser, il faut bien savoir jusqu’où vont les limites des territoires
dont on veut uniformiser la langue. Or dans le cas de l’ABN
qui est une langue partie du « hollandais » dans le domaine
linguistique des parlers « niederdeutsch »,
la frontière avec l’aire d’influence du haut allemand ne pouvait que donner
lieu à des accrochages.
Le long de
la frontière germano-hollandaise le problème fut
réglé par le tracé de la frontière politique, sans tenir compte le moins du
monde des spécificités dialectales locales, lesquelles étaient identiques de
part et d’autre de la frontière politique.
Il n’en
fut pas autrement plus au sud dans les Fourons, les « 10 communes »
et les communes actuellement germanophones.
La
spécificité dialectale aurait imposé un seul et même territoire pour une zone
partant des environs de Tirlemont le long de la frontière linguistique en
direction de Ruremonde et de là vers le Rhin au nord de Dusseldorf
puis vers Benrath sur le Rhin,en
direction de Moenchengladbach
, l’ouest d’Aix et l’est d’Eupen pour suivre ensuite la frontière dialectale
romane jusque Tirlemont. La zone
comprise dans ce triangle est celle où l’on parle le francique Rhéno-mosan aussi appelé le Limbourgeois ou le Francique
Carolingien (et oui, c’était la langue du grand Charles !) mais que tout
le monde appelle en fait le « plattdutch ».
Certes il existe des nuances entre le dialecte de St Trond
et celui de Dusseldorf ou celui d’Eupen mais ils
appartiennent à une même famille entre les lignes des isoglosses de Panningen et de Benrath.
Les
principales nuances ont toutes, sur la carte, une forme de banane et l’on
distingue ainsi d’ouest en est, une zone
intermédiaire avec le Brabançon, le Limbourgeois de l’ouest, le Limbourgeois
central (avec Maestricht, et Mouland)
, le Limbourgeois de l’Est avec Fouron le Comte,
Heerlen et Möenchengladbach), une zone intermédiaire entre le limbourgeois de
l’est et le ripuaire de Cologne et Aix avec notamment les 4 autres villages
fouronnais, les 10 communes, le canton d’Eupen (sauf Raeren
qui est ripuaire) etc…
La
similitude dialectale n’a nulle part été prise en compte dans la fixation des
frontières et il faut dès lors constater
que toutes les frontières humaines sont des frontières arbitraires, imposées
pour la plupart par le glaive ou des traités où les populations étaient
transférées comme du bétail d’un maître à l’autre. Les frontières nationales ou
provinciales imposées en 1794, 1800, 1815, 1816 (traité des limites) 1830,
1839, 1914 1918, 1940, 1945, 1963 pour ne parler que des plus récentes sont
toutes arbitraires et aucune n’a tenu compte des populations . Tout au long des
siècles, les dominateurs successifs ont certes commis de multiples exactions
matérielles à l’égard des populations mais ils n’ont jamais obligé quiconque à
parler une langue déterminée. C’est le XIX et surtout le XX qui ont engendré ce
fléau (dans le sillage de l’instruction obligatoire)
Avant
cela, es prédicateurs et prêtres brabançons ou colonais qui échouaient dans les
contrées proches des Fourons apprenaient les rudiments du dialecte local pour
pouvoir tenir leur prêche qui restait fatalement teintée de leur idiome
d’origine.
Certes les
actes écrits se passaient dans la langue du pouvoir central (brabançon en
l’occurrence) mais les délibérations se prenaient évidemment en dialecte local
(dans un beau mélange wallon-plattdeutsch » aux
Etats du Duché de Limbourg.-)
En
l’absence d’une frontière dialectale fiable dans l’espace de l’ancien duché de
Limbourg pour déterminer les limites des aires d’influence respectives de
l’Allemand, de l’ABN
naissant et du français vers lequel ces contrées étaient économiquement
tournées, il était fatal que cela donne
lieu à des affrontements . On a vu ainsi les sieurs Grammens,
Franssens, Langhor, parler
d’une terre flamande pendant que Bischoff parlait
d’une terre allemande avant la 2ème guerre. Des philologues locaux
tels René Jongen, Léo Wintgens, Armel Wynants et
d’autres ont entre-temps remis les pendules à l’heure durant les 30 dernières
années et c’est donc avec un amusement certain qu’on redécouvre à la fin du
2Oème siècle un pseudo-historien tongrois
(qui commence par dire qu’on s’y perdrait à déterminer la limite entre
l’allemand et le flamand) ressasser des
arguments maintes fois entendus chez les pseudo-scientifiques
de l’entre-deux guerres.
Sans
critère fiable pour déterminer la limite entre la zone revenant à l’allemand et
celle revenant au néerlandais, il ne saurait être question de fixer cette
limite sans tomber dans l’arbitraire. Or les germanistes n’ont pas de critère
car les langues allemandes et ABN sont toutes deux établies sur le même domaine
germanique. En clair tout le nord de
l’Allemagne aurait très bien pu (si les conquêtes politiques l’avaient permis)
parler à ce jour ABN tout comme l’ensemble des Pays-Bas et de
Par
conséquent la région située au carrefour des 3 langues n’a pas accepté qu’on
détermine à sa place la limite d’influence des langues et ce n’est évidemment
pas la farce décennale du recensement linguistique (qui ignorait le fait
dialectal) qui a pu clarifier la situation.
La dite
région opta rapidement pour un système hybride avec certains services en
français, d’autres en néerlandais et d’autres en allemand.
Avant 1914
on prêchait en flamand à Aubel centre, en français à Saint-Jean-Sart
et en allemand à
Les lois
de 1932 furent vraiment ressenties comme une ingérence intolérable du pouvoir
central dans une région paisible qui craignait à juste titre que cela n’ébranle
un fragile équilibre qui convenait à tous.
Tout cela,
J Baerten ne veut pas le comprendre et c’est ce qui
le mène à se fourvoyer dans ses descriptions
du comportement des acteurs locaux de l’époque dans les Fourons.
Dans sa
description des acteurs locaux de la politique teuvenoise,
il prend souvent comme critère pour déterminer l’opinion politique d’un
conseiller communal, le fait qu’il ait choisi pour ses enfants un école
francophone ou néerlandophone. Il ignore que cela ne veut rien dire, que par
soucis de bilinguisme, bon nombre de fouronnais placent leurs enfants dans
l’autre régime linguistique (encore aujourd’hui).
Il existe
des flamingants incapables d’aligner 5 mots d’ABN
correctement comme il existe des wallingants incapables de parler correctement
français. Cela fait partie de la réalité fouronnaise et les critères de J Baerten paraissent bien dérisoires dans de tels cas.
Il essaie
aussi de faire croire que les leaders « francophiles » faisaient
volontiers appel à des candidats originaires de Wallonie. Il devrait savoir que
s’ils n’étaient pas vraiment assimilés à
la population locale, ils n’avaient électoralement aucune chance.
Les conclusions
relatives à Teuven (p 23) sont par ailleurs sujettes à caution mais comme ces
lignes sont remplies de sous-entendus, il est difficile de savoir de qui il
parle.
A
Rémersdael J Baerten considère comme
« importé » tout qui est né à Moresnet,
Hombourg ou Aubel … alors que ce sont de bons patoisants comme les fouronnais.
Il essaye
d’opposer linguistiquement la liste « Hollands » de 1958 (emmenée par
un « ex-néerlandais » et celle d’un « importé » de
Rochefort (qui a vécu dès 6 ans à Rémersdael en parfait patoisan !)
André Schmets, Il écrit : « tegenover de te Vlaams bevonden lijst Hollands ontstond in 1958 de francofilele lijst van de waal Schmets » alors que seules des contingences locales
hors de tout contexte linguistique opposaient ces listes. Baerten
délire ensuite complètement quand il écrit que le décès de L Hollands (1960)
fut « une catastrophe pour les flamands » notamment à cause du
passage de Straetmans dans l’autre camp. La quasi
inexistence de flamands se revendiquant tels à Rémersdael à cette époque suffit
à démontrer l’absurdité de ces phrases.
De même en
1970 lorsque V Taeter opposa une seconde liste à
dominante francophone , J Baerten essaye de la
cataloguer « la plus flamande » parce que le 3ème élu,J Rouvroye (ex néerlandais éprouvant des difficultés en
français), a prêté serment en néerlandais.
Bref il
essaye désespérément de dépeindre comme flamands tous ceux qui ne sont pas
originaires de Wallonie…
A
Fouron-Saint-Pierre il détermine aussi le sexe linguistique tant des individus
que des listes en fonction du lieu de naissance. Le hasard fait qu’une majorité
de conseillers ne sont pas natifs de Fouron-Saint-Pierre (mais il semble
ignorer qu’ils ont pour la plupart épousé une autochtone) .
En 1938 il considère ainsi que la liste « flamande » de London a cédé
sa majorité en 1938 par des remplacements au profit de non-autochtones .
Dans un
chapitre intitulé « La chasse aux flamands » il évoque à sa manière
l’épisode de J.London, qui était certes flamingant
mais ne fut pas écarté au lendemain de la guerre pour cette raison mais pour sa
collaboration avec le régime allemand.
Dans la
rivalité Geurts/Steins, où
les protagonistes se servaient apparemment de l’argument linguistique pour
dénigrer leur challenger aux autorités de tutelle, J Baerten
ne se rend pas compte qu’il est bien difficile de donner une coloration
politique linguistique à des individus qui se groupent en fonction d’autres
critères. En 1958, J Baerten
croit déceler une polarisation plus poussée avec une liste CVP (J London), une
PSC (avec le duo Geurts/Steins…)
et une liste Stassen. Il nous paraîtrait étonnant que les colorations CVP et
PSC mentionnées par J Baerten figurent
sur les documents officiels pour la simple raison que ces deux partis
n’en formaient qu’un seul à l’époque. D’autre part, ce parti n’avait pas
l’habitude de laisser afficher son nom par l’une des listes en compétition dans les communes où, comme à Fouron-Saint-Pierre
toutes les listes d’intérêts communaux étaient généralement de son obédience, ce qui est aussi le cas
pour la 3ème liste évoquée.
En 1964 la « récréation » des intérêts communaux divers est
évidemment terminée et les listes sont alors « Retour à Liège » et la
liste flamande. Et J Baerten d’y aller d’un nouveau
couplet sur le caractère non autochtone de la majorité des conseillers.
Ainsi
Maurice Stassen né à Aubel en 1922 mais venu habiter Fouron-Saint-Pierre à 8
ans est un « waal » .
Sa mère est pourtant la fille du bourgmestre Schoonbroodt
de Fouron-Saint-Pierre qui présida aux destinées de Fouron-Saint-Pierre pendant
près de 3 décennies… (jusqu’en 1921).
J Baerten découvre aussi que sous le même nom de famille on
peut voir des soutiens de listes différents dans les familles Geelen, Snoeck…
Il fait
aussi grand cas du fait que Maria Vaessen, l’épouse
de l’ancien bourgmestre Steins, soutient en 1964 la liste flamande, ce
qu’elle fit encore, devenue veuve, en
1970 . E J Baerten de conclure « de
fransquillonne, comme son mari, elle redevient une femme fouronnaise
flamande ». Il est vrai que sa famille originaire de Veurs
(Fouron-Saint-Martin) était bien teintée flamande depuis longtemps.
En
conclusion il constate une relative stabilité linguistique à Fouron-Saint-Pierre
où, selon lui, seule la famille Crutzen d’origine plutôt flamande en politique est devenue
« francophile » suite à l’influence de la répression…
On doit
reconnaître à J Baerten une documentation fouillée
sur Fouron-Saint-Pierre mais il sous-estime très nettement l’importance des
mariages dans la filiation linguistique des personnages qu’il décrit.
Il est
évident que la paix des ménages exigeait que celui qui portait la culotte
impose à son partenaire sa vision linguistique (car à l’époque on ne divorçait
pas). Mais dans ses classifications il classe arbitrairement comme « étranger »
au village des personnes dont le côté maternel est de pure souche locale…
A Mouland, J Baerten relate la
lutte entre Walpot
et Tossings avant, pendant et après la 2ème
guerre mondiale. Il affirme que les seuls reproches faits à Walpot,
arrêté après la guerre, relèvent de son flamingantisme. Walpot
prétendait appliquer la loi, y compris la loi linguistique très controversée de
1932. J Baerten affirme aussi que la seule
présomption de flamingantisme suffisait à le maintenir en détention. Toujours est-il que Tossings
revint aux affaires en 1946 et ce avec une liste unique.
Il fut
toutefois renversé en 1952. «
J Baerten reconnaît que des familles importantes de Mouland sont partagées assez tôt entre le clan « francophile »
et le clan flamand (ex la famille Broers)
mais les familles
« flamandes » qui passent ainsi dans l’autre camp sont qualifiées
d’ « opportunistes » par lui…
A Fouron-Saint-Martin
c’est la personnalité de Jean Teney, flamand
convaincu mais prudent qui émerge seul. J Baerten
relève que malgré des plaintes introduites contre lui au lendemain de la
guerre, il ne fut pas inquiété. Il le devrait au fait qu’il n’aurait pas
encouragé l’implantation des organisations corporatistes limbourgeoises à Fouron-Saint-Martin.
Il conforta d’ailleurs sa majorité en 1946. En 1952 il parvint à réaliser une
liste unique et il meurt en 1957.
J Baerten relève que l’échevin Vaessen
le remplaça durant un an mais ne put se maintenir face à une liste
« francophile » emmenée par Albert Lang qui devint bourgmestre mais
meurt en 1961. Il est remplacé par Joseph Beuken jr. (lequel se montra, comme on le sait, peu francophile au
moment du rattachement au Limbourg et passa d’ailleurs dans l’autre camp après
le rattachement). Ceci implique que J Baerten doit
reconnaître qu’il généralise beaucoup trop le caractère homogène des listes
présentées. La liste qu’il présente comme francophile l’est dans sa majorité
mais pas intégralement. Les contingences
locales autres que linguistiques jouaient encore fortement jusqu’aux élections
de 1958.
Sa manie à
cataloguer les gens en fonction de leur origine lui est encore une fois fatale.
Il considère la présence de J Beuken sur la liste
Lang comme normale puisque J Beuken provient de Melen. Pour J Baerten un vrai
« wallon » sur une liste « francophile » est une situation
normale. Ce qu’il oublie une fois de plus, c’est que J Beuken
est bien intégré à Fouron- Saint-Martin, dans les
milieux flamands. J Baerten ne nous dit rien non plus
de son mariage…
A Fouron-le-Comte
J Berten relève en 1921 deux listes : la
catholique avec 8 sièges et la libérale avec 1 siège. C’est le seul village
fouronnais où l’on relève une luttte politique
« nationale ». Le bourgmestre
catholique Jean Steenebruggen se maintient jusqu’en 1930 (année de son
décès) malgré une dissidence des « Travailleurs Chrétiens » qui lui
prennent deux sièges en 1926. Son successeur Alphonse Hanssen
né à Aubel d’un père hollandais et d’une mère belge a été bourgmestre de … Mheer (Limbourg Hollandais) pendant 3 ans mais devint belge
par son mariage. Il ne put se maintenir en 1932 où apparurent …6 listes. Il fut
seul élu de la sienne. Une liste emmenée par Armand Belboom
emporte 5 sièges et confie le maïorat à Henri Broers. Sans qu’il ait d’aucune
manière qualifié de flamande ou de francophile l’une des listes jusque là,
voilà que J Baerten décrète que cette liste qui se
maintint jusqu’à la 2ème guerre mondiale était une liste flamande
qui perdit ses deux piliers H Broers et
A Belboom au début de la guerre. Hubert Belboom lui succède jusqu’à la fin de la guerre où le poste
de bourgmestre est confié à Julien Stassens,
originaire de Teuven, lequel rafle 7 des 9 sièges aux élections de 1946.
C’était
manifestement une liste de rassemblement mais que J Baerten
considère comme francophile…alors que le thème linguistique n’était peu ou pas
abordé.
La liste
d’opposition nantie de 2 siège en 1946 se voit
qualifiée de flamande et obtient la majorité en 1952. Parmi ses élus, il cite l’ancien militaire du Congo Max Michiels. Il reconnaît toutefois que la liste porte le nom
de « « Nationale Unie » mais qu’elle était en fait la liste
flamande du groupe des « Piejkvotten »
tandis que Stassens était le leader des « Roemelen ». Simplifier à ce point la lutte des Piejkvotten et de Roemelen à une
lutte « flamands » - « Wallons » relève de l’enfantillage
car ces luttes folkloriques n’ont à cette époque aucune connotation
linguistique. La liste Piejkvotten renforce
légèrement sa majorité en 1958.
J Baerten s’étonne que même dans la liste majoritaire (de Michiels )
qu’il taxe de flamande, il puisse y avoir des élus originaires de Wallonie, (Hessel de Visé, Ernens de
Hombourg et Tychon de Berneau).
Ce n’est évidemment pas difficile puisque, pas plus que sa rivale, cette liste
n’est « flamande ». Elle est seulement composée de façon homogène de Piejkvotten comme
l’autre est tout aussi homogènement composée de Roemelen .
Il
s’étonne alors que sa « majorité » flamande perde les élections de
1964. Il dit « Le 11 octobre fut un jour noir pour les flamands de Fouron-le-Comte
car leur majorité bascula par le passage du bourgmestre Michiels
vers l’opposition francophile. La défaite 6-3 était pour lui comparable à celle de Fouron-Saint-Martin 6 ans auparavant après le décès de J Teney. Il attribue en fait les défaites flamandes aux
pertes (par décès ou transfuge) d’un candidat porteur de voix. ..
Ses
classifications à Fouron-le-Comte sont des plus absurdes mais il faut lui
reconnaître des recherches très fouillées.
Il écrit
ainsi à propos de la famille Lhomme : « Plusieurs fois nous avons constaté
que des anthroponymes francophones témoignent certes d’une immigration wallonne
mais sans nécessairement signifier une appartenance francophile. Lhomme en est un bel exemple. L’ouvrier Hubert et un
commerçant homonyme n’hésitèrent pas à soutenir la liste flamande de Michiels. En tant que pensionné, Hubert signa aussi la
liste Broers en 1970. L’agriculteur Arsène
et l’étudiante Danielle signèrent 6 ans plus tard la même pour la fusion.
Cela n’empêche pas Arsène et René en 1963 et en 1965 de demander un
enseignement en français. Il était donc possible à la foi de demander en même
temps le rattachement au Limbourg et un enseignement en français »
Chacun qui
connaît Arsène Lhomme, une des figures les plus
typiques de Fouron-le-Comte sait qu’il était un Piejkvot
convaincu et donc partisan de Max Michiels, que lors
de la splitsing du village en flamands et wallons
remplaçant les traditionnels Piejkvotten et Roemelen il devint un flamand très modéré (que ses
démarches de 1963 et 1965 expliquent.). Il est un fervent praticien du patois
typique de Fouron-le-Comte. Sa fille Danielle mariée à un négociant en fourrage
d’Aubin-Neufchateau, pur wallon anti-flamand est
enseignante à l’école provinciale flamande où elle enseigne le …français mais
elle habite Aubin-Neufchateau...
Voilà des
réalités fouronnaises que Jean Baerten ne pourrait
comprendre car il ne connaît pas les
gens dont il parle et leur parcours parfois complexe. La simplification est ici
la pire erreur et il la commet bien trop souvent.
Dans sa
synthèse sur l’ensemble des familles de la commune il commet aussi différentes
erreurs.
Relevons au passage son classement abusif des Dodemont
de Rémersdael dans le camp flamand (p 62) tout comme différentes simplification
abusives dans son résumé des pages 63-65.
Il ose donner des pourcentages « flamands/wallons » en 1952 à
Fouron-Saint-Martin alors que la configuration du Conseil Communal n’a pas été
organisée linguistiquement.
Contrairement
à son affirmation (p 65), il n’y a évidemment pas de majorité flamande à
Rémersdael en 1958. Il n’y a même pas un élu qui se revendiquait flamand à
cette époque dans cette commune. Le décès du bourgmestre Léon Hollands
n’apporta aucun « désarroi dans le
camp flamand » car il n’y
avait pas de camp flamand à Rémersdael, pas plus en 1958 qu’en 1970 où la
seconde liste n’était pas non plus flamande.
En
conclusion : les généralisations et simplifications que commet J Baerten pourraient paraître « normales » dans un
pamphlet flamingant mais il prétend que ses deux livres sont des œuvres à
caractère historique car il se revendique de sa qualité d’historien.
En fait il
déshonore la corporation des historiens qui tiennent à des analyses objectives.
Dans la partie
relative à la commune fusionnée (p 67) on constate dès la première page qu’il
vaut mieux être natif de Hongrie et d’opter pour la langue flamande plutôt que
de naître à Sippenaeken (Joseph Pinckaers) ou Eupen
(Jean-Louis Xhonneux).
Dans les conclusions du chapitre, il affirme que les 6 communes fouronnaises en
province de Liège eurent plus de difficultés à s’émanciper des noblions francophones que les autres communes flamandes. Il
ne vise pas seulement Rémersdael et Teuven mais aussi Fouron-le-Comte et plus
spécialement le « rentier A Hanssen, ex-néerlandais devenu belgiciste
et donc antiflamand et francophile » Celui
qui écrit cela s’affirme historien…
A la page
72 il revient encore une fois sur les effets de décès de bourgmestres auxquels
il attribue des déconfitures flamandes. Dans le cas de Rémersdael, c’est
évidemment inexact. Il ne comprend pas
non plus que des personnes non natives des Fourons mais de
A la page
82, J Baerten se désole de voir dans le comité de
défense formé par les bourgmestres suite à l’application des résultats du
recensement de 1930, le nom de Henri Broers (« qu’on n’attendait pas dans ce comité »), une preuve de plus
qu’il a classé arbitrairement comme flamands des personnes qui n’avaient
nullement d’accointances flamandes à cette époque. Il s’étonne de l’absence du
bourgmestre Janssen de Mouland « qui aurait mieux convenu dans cet aéropage que
son collègue Broers»
P 87 il se
plait à souligner que les fouronnais ne s’entendent pas sur le caractère de
leur patois. Ils affirment que ce n’est pas du néerlandais mais un patois
allemand alors que, dit J Baerten, les dialectologues s’arrachent les dents la
dessus. Il souligne que Grammens avait remarqué que
les Fouronnais essayaient par ce biais d’avoir un régime identique aux
habitants de la région de Montzen (qui étaient passés
au français après la première guerre mondiale et échappèrent ainsi aux
conséquences administratives du recensement de 1930).
L’auteur
souligne aussi que les Fouronnais ne pouvaient évidemment pas prétendre mieux
parler le français que l’ABN car s’ils parlaient une
autre langue que le patois, c’était en fait le wallon, au contact avec les
agriculteurs du sud. Il faut souligner ce trait exact dans l’analyse de
l’auteur car elle reflète la vérité.
Il exhibe
aussi une question parlementaire de 1936 de M Vaes
qui tempêtait au Sénat contre le fait que les bourgmestres de deux communes
flamandes (Rémersdael et Teuven) ne connaissaient pas le flamand et il
demandait au ministre si cette raison était suffisante pour ne pas appliquer la
loi linguistique de 1932. Non répondit le ministre. Juste auparavant J Baerten a tout de même évoqué le fait que les Fouronnais
rechignaient à appliquer les résultats du recensement parce qu’au moment de
celui-ci il n’avaient pas connaissance des conséquences administratives
inédites qu’auraient ces résultats.
Il titre
le chapitre relatif au recensement de 1947 « La vengeance des
francophiles ». ..Et il essaye encore de prouver qu’une majorité de
fouronnais se seraient déclarés flamands à ce recensement là…car, pour lui,
ceux qui sont bilingues sont évidemment flamands…
Il évoque
les affirmation de manipulations de Van Laar et les
réfutations d’A Wynants et dit que si on peut comprendre que beaucoup de
francophiles se sentirent roulés par l’application du recensement de 1930, il
ne comprend pas pourquoi la « vengeance » n’est venue qu’en 1947 et
pas aux élections communales de 1938 où, selon lui les majorités flamandes se
trouvèrent renforcées. 0r ce n’étaient pas des majorités flamandes mais de purs
intérêts locaux qui existaient avant guerre jusqu’au clichage de la frontière
linguistique. Et c’est bien pour cette raison qu’aucun mouvement n’apparut aux
élections communales de 1938 qui avaient des enjeux purement locaux. La
question linguistique ne monopolisait pas encore l’opinion fouronnaise à cette
époque.
A la page
104 il évoque des manipulations dans les « déclarations du père de
famille » en décembre 1954 et avril 1955 concernant la langue parlée par
les enfants en application du régime scolaire dans l’enseignement. Il signale
des délibérations communales annulées pour ce fait. Il constate que des
« majorités flamandes » telles que celles de Janssen à Mouland et Michiels à Fouron-le-Comte
se livrent à ce jeu pro-francophile, de même que
« l’ex-néerlandais et vlaamsgezind (« flamingant ») Hollands à
Rémersdael « et le francophile Steins à Fouron-Saint-Pierre. J Baerten
se désole ensuite en écrivant : « De
ce qui précède on peut tirer la conclusion que même des bourgmestres flamands
sortirent du droit chemin pour faire plaisir aux francophiles ». Aucun des bourgmestres classés comme flamands
voire flamingants n’avait évidemment ce profil et cette attitude pro-francophone en est même la preuve mais J Baerten ne veut pas comprendre car cela détruit toute sa
thèse selon laquelle tout qui naît fouronnais est flamand et tout qui naît à
Aubel, même s’il ne parle que le patois est francophile (Steins)…
P 109 J Baerten essaye de monter un épingle la lettre des 4 bourgmestres
« de l’ouest » (ceux de Rémersdael et Teuven ne l’ont pas signée) le
25 octobre 1961 qui écrivaient que leurs communes étaient flamandes mais qu’ils
demandaient un enseignement renforcé du français. J Baerten croit
pouvoir y déceler la fin du terrorisme qu’aurait exercé L De Sécillon sur les autres collègues… alors qu’il s’agissait
tout au plus d’une manœuvre, certes maladroite et manipulée, pour tenter
d’obtenir l’enseignement renforcé du français.
A la page
113 J Baerten essaye de faire croire que lors d’une
réunion des mandataires fouronnais tenue à Aubel en 1961 le sénateur Baltus
aurait admis le caractère flamand des Fourons. Albert Baltus
avait le platdutch comme langue maternelle (il est
originaire de Hombourg) et connaissait très bien la situation. Il précisa
d’ailleurs au Sénat que le néerlandais avait dans les Fourons le même rôle que
le latin, celui d’une langue morte qu’on utilise dans le rituel et à l’école
mais jamais sur la cour de récréation ni en rue. Ceci était bel et bien la
vérité. J Baerten lira très utilement l’opuscule
consacré aux 20 ans du rattachement des Fourons au Limbourg.
J Baerten parle de clichés quand les francophones refusent
que leur dialecte soit considéré comme du néerlandais (p 126)
. Il devrait pourtant savoir qu’aucun dialecte ne peut être assimilé à
une langue de culture. Chaque dialecte est en réalité une langue qui a eu
politiquement moins de chance. L’impérialisme des langues de cultures leur a
octroyé une aire d’influence débordant sur des territoires appartenant à des
langues voisines qu’elles soient proches phonétiquement ou non (les exemples
suivants sont faciles à comprendre : le français en Bretagne, en Flandre
française ou en Alsace, le néerlandais en Frise, ou l’Allemand à Malmedy avant 1918.) Mais dans les territoires appartenant
à des langues de la même famille, l’impérialisme n’en est pas moins aussi
envahissant. Le dialecte limbourgeois de Tongres a dû céder devant l’ABN et tant pis si M Baerten se
plaisait à « kalle » durant sa jeunesse.
Aujourd’hui il doit « spreken » même
quand il revient à Tongres. Le fait de
cataloguer comme « néerlandaise » la langue parlée par des enfants
alors qu’ils s’exprimaient en platdutch était une
véritable atteinte aux droits de l’homme (la pratique a par ailleurs été
condamnée par
Il est
évident que le reste des enfants de
Et le
droit des gens dans tout cela ? S’il plaisait aux fouronnais de parler
désormais plutôt français qu’ABN ? C’était un
droit humain inaliénable mais il n’en a cure. IL appelle cela de la
« dénationalisation »…
Et puis il s’étonne que les parents qui à Mouland signaient pour un enseignement en français
étaient« Vlaamssprekend »…
Dans ses
conclusions à la page 153, il ne cache plus son fond. « il n’y avait pas de raison de traiter le dialecte fouronnais autrement
que les autres dialectes flamands pour déterminer la langue de
l’enseignement . Ce problème aurait dû être réglé légalement et de façon
étanche avant qu’on ne reconnaisse des facilités ». Dans son esprit
donc, il aurait fallu renier le dialecte au profit de l’ABN
comme l’on fait les flamands et puis examiner si les quelques francophones
immigrés pouvaient recevoir des facilités. Elle est belle la démocratie à la Baerten. C’est en définitive exactement un énergumène à
Dans sa
conclusion (dont il existe une version française qui résume assez bien ses
thèses) il nie qu’il y ait eu un problème fouronnais ( !) Il aurait suffi
selon lui d’un commissaire spécial pour mettre le bourgmestre de Teuven Lionel
de Sécillon au pas en 1932 …
Quand on a
fini de lire la prose de Jean Baerten on est
convaincu que des énergumènes de ce type sont irrécupérables pour la démocratie. Quand une population se rebelle contre
l’imposition d’une langue qu’elle estime contraire à ses intérêts
, il y voit de la manipulation , du terrorisme intellectuel , des
pressions inadmissibles…
Toujours
est-il que le bilan de 40 ans de luttes sournoises avant 1963 et de 40 autres
années de lutte ouverte après 1963 est lamentable. Une population qui avait
vécu en harmonie parfaite jusque là s’est divisée de façon définitive en deux
clans opposés avec des clivages dans les familles et les villages, en coupant
la vie associative en deux. Tout cela parce qu’on a voulu régler le sort des
fouronnais sans se soucier de leur avis.
Si le
régime existant avant 1932 avait subsisté, il est probable que les Fouronnais
dans leur ensemble seraient restés attaché à leur dialecte mais auraient tous
adopté le français comme langue de culture et d’enseignement, comme cela s’est
pratiqué dans la région voisine à l’est.(où le théâtre
dialectal est très vivant)
Maintenant le dialecte est en voie de disparition dans
les Fourons, au profit de deux langues étrangères à la région, l’ABN et le Français. .
Le XXème siècle présente cette
particularité d’avoir à la fois généralisé l’enseignement des masses en Europe
mais d’avoir en même temps favorisé la plus grande aliénation culturelle de
tous les temps, à savoir la disparition en Europe de centaines de langues
régionales originales, savoureuses, pittoresques et qui faisaient partie du
patrimoine de l’humanité. Il a sauvé (mais aussi détruit) beaucoup
de belles pierres mais il aura abandonné un patrimoine au moins aussi estimable
que sont ces langues régionales au profit de langues de culture qui
disparaîtront chacune à leur tour au XXIIe siècle.
L’affaire
des Fourons n’en est qu’un épisode sans doute célèbre parce qu’il se déroule à
la limite de deux plaques tectoniques, celle de la romania
et de la germania.. .mais
c’est toujours à ces limites que se déroulent les tremblements de terre …
Albert STASSEN